Nous avons assisté pour vous aux 2 grosses conférences de presse en France et en Belgique, organisées d’une part par la Maison de la Culture du Japon à Paris (lundi 11 octobre) et au Palace à Bruxelles, avec la Libraire Brüsel Anspach (mardi 12 octobre).
On en a retiré la substantifique moelle pour faire rejaillir toute vos souvenirs d’enfance, au travers de cette interview commentée par les 5 auteurs !
Attention: Vous pouvez trouver la chronique détaillée de cet album en suivant ce lien !
1ère expérience avec Goldorak pour les 5 auteurs :
De droite à gauche sur la photo:
Denis Bajram (DB) : scénariste et dessinateur en charge du fil conducteur du projet
Le gout de l’interdit : je n’avais pas le droit de regarder Goldorak mais tout le monde en parlait autour de moi. A 10ans, je décalquais les cases d’une revue Goldorak pour créer ma propre histoire.
Alexis Sentenac (AS) : Dessinateur
Très Impressionné par les designs de Minas et des Golgoths
Xavier Dorison (XD) : Scénariste
Je me rappelle parfaitement que le vendredi, il fallait absolument être devant son écran afin de « partir ailleurs » ; tous mes copains et moi on avait rendez-vous avec notre héros !
Yoann Guillo : (YG) ; Coloriste
Ce qui m’a marqué en premier, c’était le côté adulte, plus sombre des histoires, on n’était pas habitué à ça à l’époque ; et son rythme aussi !
Brice Cossu (BC) : Dessinateur
Plus jeune (né en ’82) : le disque de Noam !
Qui a lancé le projet ?
C’est lors d’un afterwork fort tardif entre Xavier Dorison et son éditrice (Christel Hoolans, des éditions du Lombard et de Kana), en marge d’un festival d’Angoulême.
Ils balaient ensemble les avancées des différents projets en cours puis, après la séance de travail, XD se convie à elle de son amour d’enfance pour Goldorak.
Hasard, l’éditrice lui dit qu’elle va prochainement au Japon et qu’elle peut en parler avec l’éditeur de Goldorak !?!
Fort retourné par cette idée, Xavier Dorison s’emballe et en parle directement avec son ami Denis Bajram puis à Alexis Sentenac. Après une certaine période de doute (trouille) d’une dizaine d’heures, ils lancent le projet mais veulent incorporer leurs collègues de studio virtuel (avec qui ils travaillent tous les jours) : Brice Cossu puis à Yoann Guillo, car Denis Bajram connait leur grande culture japonaise.
Les 5 auteurs reçoivent 1 mois après la réponse favorable de Christelle Hoolans et réalisent ensemble alors un dossier de présentation maquetté en Japonais pour Go Nagai, ce qui a représenté un énorme travail pour Kana et les auteurs.
La réponse de Go Nagai est revenue 15 jours après avec un « oui de principe » (ce qui est hyper rapide pour le Japon).
Pour être honnête, il faut préciser qu’après cet accord de principe, il a encore fallu un an et demi de négociations pour finaliser le contrat entre les avocats des 2 parties… mais le train était lancé !
Il est intéressant aussi de savoir que Go Nagai aujourd’hui est plutôt devenu un gérant d’une société de merchandising (que l’auteur a créé afin de mieux cerner ce qui se faisait à l’étranger sur sa licence et pour préserver ses droits d’auteur).
Ce qui a beaucoup aidé aussi dans cette approbation est que pour Go Nagai (et les japonais en général), nos BD francobelges sont des ArtsBooks fabuleux…
Go Nagai était fort surpris par cette idée puis a directement été séduit par ce qui lui était proposé.
Un secret mieux gardé encore que la fameuse cachette de Goldorak…
Le secret a été gardé très longtemps entre les auteurs (cette BD a mis 5 ans à sortir !) : la raison était que les auteurs voulaient présenter une BD finie, terminée, et complètement colorisée !
DB : On sentait bien qu’il y avait une énorme attente et on a voulu éviter au maximum la pression et les pré-jugements. Voilà pourquoi nous n’avons rien montré à personne avant ces 2 derniers mois. (Ndlr : sauf la planche qu’ils avaient présentés à l’époque à Go Nagai - cfr. cette news du 01 février 2020).
Pourquoi décider une suite, et non un épisode « entre deux » ?
XD : On ne voulait pas toucher à l’œuvre, car on la respecte. Très naturellement, on a choisi d’imaginer une suite à ces aventures, une séquelle.
DB : On ressentait l’absence de Goldorak, il nous manquait ; c’est ainsi que toute la 1ère partie du livre parle justement de cette absence…. Et puis on était aussi un peu frustré par la fin de la série…. Qu’étaient-ils devenus ? Dans quel état était Alcor après avoir choisi de laisser partir Fénicia et Actarus sans avoir voulu les saluer une dernière fois…
XD : On voulait raconter la mise en abime entre les années passées (celles de nos tendres années vertes) et ce que nos héros étaient devenus… Les enfants que nous étions alors avaient grandis, forts vieillis ; en était-il de nos héros aussi ?
Ensuite est venue la structure de l’histoire, en travaillant « naturellement » ensemble, en lançant des idées, des pistes, en les organisant, les articulant entre elles et en les liant.
Comment avez-vous pu surmonter la peur de gâcher une œuvre culte ?
DB : Tous les 5, nous avons œuvré de concert ; nous avons fait et refait des scènes, il y a des quantités invraisemblables de Story-boards qu’on a jetées, ré-aménagées afin que ce qui était envoyé à Go Nagai soit le plus parfait possible.
C’est grâce à ce travail commun que nous avons pu mettre en œuvre ce projet qui, pour un auteur isolé, pourrait représenter l’œuvre d’une vie.
A l’heure où l’on travaille souvent seul sur sa planche, ici on a travaillé ensemble et de concert.
BC : Cette aventure nous a marqué tous les 5, durant ses 4 ans. Ca a été sacrément intense !
XD : Ca n’a pas été pour autant une démocratie ! C’était plutôt une « dictature éclairée » : il fallait que nous soyons tous d’accord sur ce qui se faisait. (il y en a un qui au final décidait, selon la problématique, mais nous n’avons dans les faits pas dû aller jusque-là).
DB : Ainsi, à un moment, un gamin se faisait traiter de « morveux », XD n’aimait pas ce terme et ont cherché dans tout le dictionnaire un autre terme qui soit accepté par tous.
Et puis les Pré-Commandes ont été lancées…
AS : Je me suis occupé de la maquette du collector et j’ai voulu présenter à Kana le résultat. Mais à peine l’annonce publiée sur les réseaux sociaux que nous avons reçu une avalanche de demandes pour savoir comment se procurer l’édition Collector (tirées à 10 000 exemplaires - cfr. cette news du 1er août 2021). En une seule journée les commandes libraires étaient sold-out. De la pure folie !
DB : j’ai eu peur, surtout à la fin : j’ai bouclé le livre avec Yoann sur la couleur et le jour où on a eu fini, j’ai eu peur d’avoir tout loupé. Professionnellement, on a fait un boulot formidable, mais peut-être que nous étions passé à côté des attentes des lecteurs. C’est vraiment avec le retour des premiers lecteurs (la presse, les amis, les collègues) que j’ai pu redormir…
YG : moi je vis ce stress énorme depuis une semaine, même si on a reçu des mails perso’ de journalistes ayant déjà lu l’album qui nous remerciaient…. C’est du jamais vu.
DB : on savait que les « Gardiens du temple » seraient là, à scruter nos planches sur la moindre erreur ; On espère les satisfaire, mais on vise aussi le grand public, qui connait en surface l’Anime, qui en ont gardé un souvenir d’enfance. Enfin, on espère aussi que les lecteurs plus jeunes qui n’ont pas connu l’Anime s’intéresseront aussi à ce One-shot.
Heureusement pour nous, les retours faits par les « gardiens du Temple » sont eux aussi positifs : cet album n’est pas perçu comme un simple album « fan service ».
BC : J’attends la sortie.
AS : La BD est lisible par tous, « même par la belle mère de XD qui -même elle !- l’a aimé » :)
Goldorak, un WorldComics (une synthèse des 3 grands axes de la BD) ?
DB : XD et moi sommes de culture FrancoBelge. Or, sur ce projet, il fallait aussi respecter les codes du manga, c’est pour cela qu’on a voulu avoir BC et AS avec nous : ils sont nourris eux des codes manga.
On a passé beaucoup de temps à équilibrer ces codes ; à un moment, on a craint sérieusement de planter le projet. Et puis la magie à opérer et notre projet a alors véritablement décollé.
XD : si vous regardez Actarus dans l’Anime, il a des bras de superhéros de comics, les décors sont situés graphiquement aux USA (avec de la musique Country) mais avec en fond un Mont Fuji…. Dans l’anime Go Nagai mélangeait déjà les genres.
A notre tour, on a voulu faire un melting-pot d’influences japonaises et francobelges, en fusionnant nos styles.
AS : Et Kana nous ont laissé champ libre total, malgré que nous ayons explosé les délais (le Covid pour ça nous a bien aidé ;)
Avez-vous eu une réaction de Go Nagai sur votre livre ?
DB : Go Nagai a reçu toutes les planches finies, mais on n’a pas eu de retour final (mais vu les relations sociales au Japon, c’est normal). Si on le rencontre un jour, on espère le croiser pour voir dans ses yeux ce qu’il a réellement pensé de notre travail)…
Avez-vous d’autres projets de ce type, sur d’autres licences ?
XD : non, des créations originales, c’est bien aussi. ;)
AS : « Cobra » et « Ulysse 31 » !
DB : « Universal War 2 », une petite licence en déshérence… ;)
BC : « Astro le petit robot »
Votre BD sera-t-elle éditée dans d’autres langues ?
DB : Un potentiel projet en japonais est en réflexion, même si pour l’heure, on préfère souffler et savourer le fruit de notre travail (Ndlr : Historiquement et paradoxalement, Goldorak n’a pas bien fonctionné chez eux).
XD : Pour le Japon, on a un projet, mais il n’y a encore rien pour l’heure.
AS : En Italie, les éditeurs se battent actuellement pour avoir la BD et aussi on a appris très récemment que les USA se montraient très intéressés aussi.
L’album sort ce vendredi 15 octobre, vous savez où vous rendre directement !
Et pour les éditions Collector … si vous n’avez pas réservé le vôtre bien en amont… c’est mort (D’autant qu’une source externe nous expliquait qu’il y avait eu des grosses pertes dans son tirage, ce qui fait que toutes les précommandes ne pourront sans doute pas être honorées)…
Attention: Vous pouvez trouver la chronique détaillée de cet album en suivant ce lien !
A titre personnel, merci à Quentin (de la librairie Brüsel Anspach Anspach) et surtout à Stéphanie la super-gentille attachée de presse de Kana qui est toujours au taquet! C'est un plaisir que de cotoyer des passionnés ainsi par leur métier!