Les damnés de Cape Town
Scénariste : Caryl Ferey
Dessinateur : Corentin Rouge
Coloriste : Alexandre Boucq
Coloriste : Corentin Rouge
Editeur: Glenat
♥ Coup de cœur ♥
Mon avis
Magistral, tel est le premier mot qui vient à l’esprit après avoir refermé cette bande dessinée de 152 pages qui nous emporte sans aucun temps mort dans l’Afrique du Sud 20 ans après la fin de l’apartheid mais où demeurent encore énormément d’inégalités entre les noirs et les blancs.
Petit lexique. Sangoma, c’est le nom donné aux tradipatriciens d’Afrique australe, particulièrement en Afrique du Sud. Ces guérisseurs sont très respectés et leur nombre est estimé à 200.000 en Afrique du Sud, à comparer aux 25.000 médecins formés à l'occidentale ! Les guérisseurs prescrivent souvent à leurs patients des muti, médicaments à base de plantes et de produits animaux et minéraux, porteurs d'une signification spirituelle et d'un pouvoir symbolique.
L’album s’ouvre sur une double pleine page de l’inspecteur Shepperd, arme à la main, c’est à signaler car cette double page s’inscrit avant même la page de garde traditionnelle avec le titre et les mentions des scénariste et dessinateur. C’est très probablement pour plonger directement le lecteur dans cette histoire vraiment prenante.
Le scénariste Caryl Férey est un écrivain français connu pour son roman Zulu paru en 2008 et qui traite aussi de l’Afrique. Il a déjà fait une incursion dans le monde de la bd avec deux tomes de la série « Maori » chez Ankama en 2013 et 2014 et « Sangoma » est sa première bande dessinée chez Glénat, avec un retour en Afrique avec ce polar thriller.
Certes il connaît bien son sujet pour avoir parcouru l’Afrique, et ancre l’histoire dans la réalité de l’Afrique du Sud d’aujourd’hui, sans être manichéen, mais en outre il s’attache aussi à la psychologie des personnages, creusant dans les racines des différents protagonistes qui ne sont pas lisses, tout blancs ou tout noirs 😊 Il faut dire que le bouquin n’est pas un traditionnel 48 pages et donc il a l’occasion de développer correctement son histoire sans se presser. Mais pas de longueurs non plus, il y a de l’action, quelques touches d’humour (l’équipe de choc du lieutenant Shepperd avec sa nouvelle collègue le lieutenant Cole, les réflexions sur sa caisse, Tristan & Iseut), et on n’a pas le temps de s’ennuyer ni de décrocher de sa lecture !
Corentin Rouge au dessin nous régale d’un dessin réaliste et nous réjouit avec des illustrations pleines pages à couper le souffle, des décors de toute beauté, des superbe gros plans des visages et des regards (page 11 ou 147 par exemple), et des scènes d’action où il excelle également. Et pour être le plus crédible possible, il est allé en repérage sur place pour s’imprégner de l’ambiance et prendre une série de photos des lieux, notamment dans la région des vignobles.
J’ai trouvé son trait semblable à du Vallée ou du Meyer, même si lui se revendique de la lignée des Hermann, Boucq ou Giraud. Bref, du très haut de gamme et du tout bon ! C’est déjà lui qui a dessiné formidablement la série Rio (4 tomes avec Louise Garcia au scénario) et un épisode de XIII Mystery (tome 10 Calvin Wax).
La colorisation est superbe également et participe à la magie de cet album, et on la doit à Corentin Rouge aidé d’Alexandre Boucq (tiens tiens…).
Un énorme coup de cœur et probablement la bande dessinée de l’année pour moi !
Maroulf