Série: Les Aigles de Rome # 3
Auteurs: Enrico Marini
Editeur BD: Dargaud
Une chronique BD: Génération BD
Si Le Scorpion reste, pour les bédéphiles, la série phare d'Enrico Marini, Les Aigles de Rome quittent néanmoins définitivement, avec ce troisième tome particulièrement réussi, leur nid pour prendre avec assurance leur envol vers une reconnaissance amplement méritée.
Le pari de Marini n'était pourtant pas gagné d'avance. Le succès de ses précédentes séries, il le devait en effet en partie à ses co-pilotes, ses partenaires d'aventure, que sont notamment Stephen Desberg (Le Scorpion) ou Jean Dufaux (Rapaces), qui lui offraient un scénario "clef sur porte". Avec Les Aigles de Rome, Marini manie à la fois, avec maestria, la plume et le crayon. Et même le pinceau puisqu'il assure aussi la mise en couleur. Or, les auteurs qui excellent à la fois dans le dessin et l'écriture ne sont pas pléthore dans l'univers du neuvième art. Marini fait assurément partie de ceux-là. Non seulement le dessin est toujours bluffant, mais les dialogues sont très fluides et l'histoire, avec le recul désormais de trois tomes, plutôt bien construite.

Si Le Scorpion nous emmenait dans la Rome de la Renaissance, les Aigles de Rome font un retour en arrière de plusieurs siècles puisqu'ils nous plongent en pleine Rome antique, où le "cape et d'épée" fait place au péplum, et où la vie des légionnaires et autres romains est très éloignée de celle croquée par Uderzo dans Astérix. Violence, moeurs légères, voire débauche, et luttes de pouvoir sont ici au coeur de l'histoire et du quotidien de nos héros, Marcus Valerius Falco et Gaïus Julius Arminius en tête. Il n'y a, à travers leurs périgrinations et quête de reconnaissance, guère de place pour l'insouciance, la contemplation et la douceur de vivre.
On retrouve dans cette série certains ingrédients, surtout les épices, qui ont fait le succès du Scorpion : une pincée de trahison, deux ou trois de conspiration, une petite louche d'érotisme, une atmosphère toute particulière qu'on doit à la magie de la mise en couleur directe, une intrigue "bien ficelée" et, en filigrane, une quête identitaire. Celle d'un de nos deux héros principaux, Arminius, fils d'un chef barbare, qui est certes devenu citoyen romain, mais après son enlèvement par les légions romaines, alors qu'il n'était qu'adolescent, au terme de longues campagnes et de terribles combats visant à "dompter" les tribus de Germanie.
Ce nouvel album est un véritable tournant dans cette série prévue en cinq tomes. Les personnages étant désormais bien en place, le rythme peut être plus soutenu et le suspense plus intense. L'ambiance, à l'image des couleurs bien plus sombres au regard des deux premiers tomes, est lourde, pesante. C'est que l'heure n'est pas à la gaudriole; l'Empereur Auguste vient en effet de charger Marcus de vérifier le bien-fondé de rumeurs de rébellion en Germanie dont Arminius pourrait s'avérer être l'instigateur. C'est chargé de cette mission d'espionnage que Marcus va retrouver son "frère de sang" en Germanie...
Vds